(Montréal) Une nouvelle molécule que sont à développer des chercheurs de l’Institut de recherche en immunologie et en cancérologie (IRIC) de l’Université de Montréal pourrait freiner la capacité du coronavirus à envahir les cellules humaines et limiter les dommages que la maladie cause ensuite dans les poumons.

« Les travaux consistent à développer une molécule qui […] va aller s’attacher sur une cible thérapeutique, et en se liant elle va avoir deux effets distincts, pas un seul effet », a résumé un des responsables du projet, le pharmacologue moléculaire Michel Bouvier.

La nouvelle molécule cible dans un premier temps la protéine ACE2 qui se trouve à la surface des cellules. Le SRAS-CoV-2 utilise cette protéine pour infecter les cellules humaines, et notamment les cellules pulmonaires.

La nouvelle molécule « efface » la protéine à la surface des cellules, privant le virus des accès dont il a besoin.

« S’il y a moins de ACE2, il y a moins de ports d’entrée pour le virus et on devrait avoir moins d’entrées virales, a dit M. Bouvier. La perte de ACE2 devrait entraîner une baisse de l’entrée du virus. C’est une des actions de notre molécule. »

La nouvelle molécule pourrait aussi être en mesure de limiter les dommages causés aux poumons par la maladie en bloquant certains signaux intracellulaires.

On retrouve à la surface des cellules des récepteurs qui reçoivent différents transmetteurs. Dans ce cas-ci, un transmetteur est activé de façon plus abondante, ce qui nuit à l’intégrité des cellules pulmonaires.

La nouvelle molécule bloque l’activation des transmetteurs qui sont surexprimés et induisent les effets néfastes pulmonaires.

« On a une seule molécule qui bloque ces deux actions-là en même temps, a expliqué M. Bouvier. On pense que par ces deux avantages-là, cette thérapie-là risque d’être une thérapie assez efficace autant au début de l’infection […] dans les premiers stades de l’infection virale […] et aussi diminuer la progression de la maladie en inhibant ces effets délétères sur la fonction pulmonaire. »

Il s’agit toutefois d’un projet à long terme. Les expériences en laboratoire se poursuivront pendant encore quelque temps, avant de faire place aux modèles animaux et, possiblement, aux tests sur des humains.

Il n’est donc pas impossible que la molécule soit mise au point trop tard pour combattre le SRAS-CoV-2, contre lequel on disposera alors peut-être d’un vaccin ou d’un traitement.

Cela ne voudra toutefois certainement pas dire que ses collègues et lui auront travaillé pour rien, croit Michel Bouvier.

« Il vaut mieux avoir plus de lignes à l’eau, a-t-il dit. Il y a d’autres coronavirus qui existent déjà et qui utilisent le même mode d’action au niveau des cellules pulmonaires, la même porte d’entrée qui est ACE2.

« Donc on pourrait envisager que ça puisse être un traitement contre d’autres coronavirus existants, et éventuellement d’autres coronavirus qui pourraient faire le transfert […] vers l’homme, comme on l’a connu malheureusement cette fois-ci. »